L’écoute et l’analyse d’innombrables informations et thèses autour de Minembwe m’amènent à croire qu’il y aura l’après Minembwe. La question qui se pose est celle de savoir quand et s’il attendre une autre génération des dirigeants politiques et administratifs.
De nos jours, Minembwe évoque ce qu’il est convenu de désigner comme communauté des Banyamulenges. Ce dernier vocable a une origine relativement récente, située bien après le 30 juin 1960. Alors la bonne question à poser est celle de savoir qui, dans l’arsenal juridique congolaise, baptise les communautés. Ensuite examiner si la communauté des ressortissants Rwandais a été régulièrement baptisée Banyamulenge. Dans l’affirmative, les Congolais doivent avoir la sagesse d’assumer leurs œuvres. Dans le cas contraire, la génération actuelle des dirigeants politiques faillirait à sa responsabilité historique de rétablir l’ordre social et politique si elle ne prenait pas des mesures idoines et courageuses, une fois pour toutes. Faut-il attendre une autre génération ?
Minembwe évoque aussi un village, une terre, qui existe depuis la création du monde, depuis que le Congo a été délimité en 1885, depuis la proclamation de l’indépendance du Congo le 30 juin 1960. Ce village était habité. Cette terre est un don de Dieu à des familles, à une ou des ethnies ; elle leur appartient, et par elles, cette terre appartient à la RDC. Des immigrés venus du Rwanda ou du Burundi ont humainement bénéficié de l’hospitalité naturelle accordée aux personnes en détresse, qui, pour des raisons politiques, sociales ou économiques, optent pour vivre en dehors de leur pays naturel. La question se pose de savoir si les règles de l’hospitalité congolaise ont été violées ou ignorées ou abusées. Si la réponse est négative, alors il n’y a pas de problème.
L’agitation autour de Minembwe prend sa source ailleurs ; cette source doit être démasquée et assainie par les Congolais d’abord et les immigrés Banyarwanda également. Si la réponse est positive, la responsabilité des Congolais est sacrée pour rétablir l’ordre.
Faut-il attendre une autre génération ?
Lors du débat parlementaire du 19 octobre 2020 à l’Assemblée Nationale de la RDC, j’ai entendu un député qualifier le problème de Minembwe de juridique et sociologique.
Est-ce sa façon de dire que le problème est complexe ? Si oui, j’en conviens. Mais il n’y a pas de problème sans solution ; hélas il y a des gens qui ne trouvent jamais des solutions à des problèmes qu’ils feignent ignorer ou ne peuvent pas discerner. Un autre député a parlé de haine sans préciser de qui et envers qui en réalité. Je n’ai pas entendu, peut être par mégarde, parler du mépris, de la l’arrogance et de la provocation que subissent des ressortissants Congolais de part de leurs hôtes venus du Rwanda, matin, midi et soir selon l’expression historique de Patrice Eméry Lumumba, de vénérée mémoire.
Ces ressortissants Congolais prennent leur mal en patience ; ils attendent que les dirigeants politiques et administratifs créent le cadre d’une vie harmonieuse et paisible, car ils sont conscients que le malheur n’arrive pas qu’aux autres et que certains de leurs descendants vivent en paix dans des pays étrangers à travers le monde, même au Rwanda, parce qu’ils respectent les lois et règlements des pays hôtes.
La question se pose donc de savoir quelles seraient les lois et règlements congolais que les ressortissants du Rwanda en RDC ne respecteraient pas.
Existe-t-il des lois ou règlements pris en leur faveur par ruse, cupidité ou corruption, en marge ou violation des lois et règlements antérieurs ? A ces deux questions, le débat parlementaire du 19 octobre susmentionnée fournit des éléments d’une réponse nettement positive, selon mon entendement. La génération actuelle des dirigeants politiques a l’occasion et la responsabilité de crever l’abcès et de soigner la plaie, avec détermination, vigueur et justice. La Pensée parallèle de De Bono me permet d’identifier cinq pistes d’actions déterminantes.
• En premier lieu, le Parlement congolais devrait prend une loi qui bannisse le vocable Banyamulenge en RDC et qui reconnait sans complexe, l’existence des Congolais d’origine Rwandaise qui vivent au milieu d’autres Congolais, sans territoire propre.
• En deuxième lieu, le Conseil d’Etat devrait être saisi ou se saisir de la revue de tous les actes administratifs parlant des Banyamulenges en vue de déclarer nulles toutes mentions y afférentes, sans remettre en cause la nationalité congolaise régulièrement acquise, ni couvrir l’octroi illégal de cette nationalité.
• En troisième lieu, le Gouvernement Central et l’Assemblée Provinciale du Sud-Kivu devraient harmoniser les actes administratifs nécessaires à la désignation et à la délimitation des entités locales légitimes.
• En quatrième lieu, l’Administration territoriale, la Police et, si nécessaire, l’Armée devraient promouvoir la paix sociale et maintenir l’ordre sur Minembwe et ses environs d’une manière particulière et pendant le temps nécessaire. C’est un prix à payer.
• En cinquième lieu, le Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération régionale devrait monter et diriger vigoureusement une campagne de défense des intérêts congolais dans tous les fora sensibles au cas Minembwe et fournir les explications diplomatiques avisées. C’est un autre prix à payer.
Aucune protestation ou dénonciation ambulatoire dans les rues de la Capitale congolaise ou ailleurs, aucune déclamation tapageuse ou éhontée des connaisseurs de l’histoire de Minembwe et des turpitudes congolaises y afférentes, aucune vaine jérémiade politique ne changera quoi que ce soit à la situation existante. Le temps coule inexorablement.
Faut-il attendre une autre génération des dirigeants politiques ?
Paul Yuma Morisho
Consultant Senior, Développement des Stratégies de Gestion.